L’état de la France
Créations
d’emplois en nombre insuffisant, faible croissance, compétitivité
industrielle en berne, pauvreté et précarité plus que jamais élevées :
le bilan des cinq dernières années de Jacques Chirac est peu glorieux.
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Une
légende tenace veut qu’en France, la gauche au pouvoir, toute à sa
volonté de redistribuer les richesses, vide les caisses et finisse par
mettre la clef sous la porte sans avoir réussi à relancer la croissance
et l’emploi. Aggravant au final la situation de ceux qu’elle prétend
défendre. La droite serait, en revanche, bonne gestionnaire ; elle
relancerait l’activité, créant emplois et richesses au bénéfice de tous.
A examiner le bilan des cinq dernières années, on est conduit à
sérieusement nuancer le propos. Les gouvernements de Jean-Pierre
Raffarin et Dominique de Villepin se sont davantage préoccupés de
redistribuer – au profit des plus aisés – que de relancer l’activité.
Résultat : des créations d’emplois en chute libre, une compétitivité
industrielle qui connaît un déclin inquiétant, une dette publique qui
progresse et même, conséquence mécanique de l’atonie de l’activité, des
prélèvements obligatoires en hausse ! Parallèlement, la précarité et la
pauvreté n’ont pas régressé, une large partie des jeunes peine à
obtenir un emploi stable, et nous allons vers l’avenir à reculons : la
recherche est en berne et la crise de l’Université toujours là. Enfin,
la société ne va pas bien non plus, comme en témoignent la montée des
violences contre les personnes ou l’inquiétude croissante des Français
face à la mondialisation et l’Europe, dont le rejet du traité
constitutionnel en est une conséquence.
Certes, tout ne relève pas, dans ce tableau, de la responsabilité de la
majorité sortante. Le cycle économique ne lui a pas été favorable
durant les premières années. Reste qu’à concentrer son action sur des
mesures de revanche sociale – remise en cause des 35 heures, baisses
d’impôts ciblées sur les plus aisés, diminution drastique des emplois
aidés –, elle a laissé s’inverser la tendance observée jusqu’alors, qui
donnait à la France des performances supérieures à celles de ses
voisins. En imaginant que la flexibilité allait suffire à relancer
l’emploi, elle n’a fait que fragiliser la situation des salariés des
PME et a découragé la jeunesse. Si la France a renoué avec la création
d’emplois depuis maintenant deux ans, c’est moins grâce au contrat
nouvelles embauches (CNE) qu’au retour, sous la pression de la réalité,
à une politique de l’emploi moins dogmatique.
A l’heure où l’on parle de la nécessité d’élever la culture économique
des Français, il serait bon que le débat électoral se concentre enfin
sur les faits. Et que soient mis en relation les orientations des
programmes des candidat(e)s et les résultats obtenus dans le passé par
les majorités auxquelles ils (elles) ont activement participé.
Philippe Frémeaux |