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Gauche ouvrière et chrétienne
17 mars 2008

Sifflé

laurent joffrin

QUOTIDIEN : lundi 17 mars 2008

Monsieur le Président, il faut que quelqu’un vous le dise : vous avez perdu, et bien perdu, ces élections municipales. Dans un accès de mauvaise foi soviétique, vos affidés, vos porte-voix et votre Premier ministre ont beau soutenir le contraire, ce premier scrutin, tenu dix mois après votre élection, se solde par un désaveu cinglant.Dans un festival de langue de bois, manifestement télécommandé de l’Elysée, les responsables de l’UMP s’obstinent à nier l’évidence. Mais Marseille, conservée de justesse par Jean-Claude Gaudin, ne peut pas cacher la forêt. La gauche est désormais majoritaire en voix et conquiert un grand nombre de villes ; elle remporte plusieurs succès emblématiques, comme à Toulouse, à Périgueux, à Lille, à Reims ou à Metz. Et surtout, la mobilisation voulue par les partisans de Nicolas Sarkozy entre les deux tours débouche sur un fiasco. L’échec confirme bien, dans un sondage portant sur 44 millions de personnes interrogées, ce qu’on avait deviné : le charme sarkozien s’est rompu en quelques mois.

Atteints d’autisme électoral, les porte-coton élyséens incriminent l’abstention. Mais si elle est forte, elle a surtout frappé la majorité, ce qui réduit l’argument à néant. Ils affirment aussi que ce vote est avant tout local. Mais s’il n’y avait que cette seule dimension dans la consultation, pourquoi les candidats UMP ont-ils à ce point camouflé leur proximité avec Nicolas Sarkozy ? Et pourquoi de nombreux maires de droite sortants, qui n’ont pas forcément démérité dans leur ville, ont-ils mordu la poussière ? La ligne de défense des vaincus - circulez, il n’y a rien à entendre - ne résiste pas au simple examen des faits.

La ligne future des gouvernants est à l’avenant. Les Français nous disent que nous allons dans la mauvaise direction ? Une seule réponse : il faut y aller plus vite. Voilà qui présage un étrange acte II pour le sarkozysme agissant, dans cette pièce sifflée dès les premières répliques…

La gauche pavoise. On peut la comprendre. Elle l’emporte dans des lieux où il était écrit de toute éternité électorale que ses adversaires dominaient. Mais cette victoire est aussi lourde de menaces. Outre que l’opposition profite, sans avoir fait grand-chose, de la déconfiture présidentielle, elle doit, elle aussi, comprendre le message de l’électorat. Si la gauche gagne, c’est en raison d’une configuration très particulière. Les scrutins locaux la contraignent à une stratégie très précise. Il lui faut, pour l’emporter dans les villes, désigner à l’avance un chef de file crédible, qui emmène la liste et porte le projet. Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette condition, élémentaire dans une municipale, n’est pas remplie au niveau national. Certes les leaders ne manquent pas. Mais, selon le mot du Général, la gauche doit craindre non pas le vide mais le trop-plein. Déjà, les nombreux pères - et mères - de la victoire se disputent le rejeton…

Il faut enfin, pour gagner une mairie, proposer un plan réaliste et imaginatif, ce qui fut souvent fait. Où est-il à l’échelle du pays ? La critique abonde mais les idées de changement font défaut. Il ne manque, au fond, qu’une seule chose à cette gauche devenue pour l’essentiel réformiste : des projets de réforme.

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