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Gauche ouvrière et chrétienne
27 novembre 2007

banlieues:"Des territoires en voie de ghettoïsation"

Certains évoquent déjà un "Clichy bis", après le déclenchement de violences à Villiers-le-Bel dimanche soir. Existe-t-il un risque de voir se reproduire des émeutes urbaines de l'ampleur de celles de novembre 2005 ?

- Il est très difficile de donner des prévisions, mais il me semble que c'est fort possible. De nombreux éléments sont en effet réunis pour assister à une flambée de violence. La mort de deux jeunes hommes, la négligence, semble-t-il, des forces de police qui auraient d'abord porté secours à leurs collègues avant de s'occuper des deux adolescents, le racisme anti-jeune ambiant, le climat très fort de racisme anti-maghrébin, le déploiement extrêmement important des forces de police juste après l'accident...
Tous ces éléments laissent craindre un "Clichy bis". D'autant qu'ils surviennent dans un contexte très particulier de suspicion générale très forte vis-à-vis de l'immigration, de redéfinition des notions de culture et d'identité française. Sans oublier l'appauvrissement de plus en plus fort des zones urbaines sensibles (ZUS), qui conduisent à des territoires en voie de ghettoïsation.

Le diagnostic de François Hollande, qui a évoqué une "crise sociale profonde", vous paraît-il justifié ?

- Effectivement, on peut parler de crise sociale, mais celle-ci est territorialement ciblée. Il s'agit d'une crise urbaine, bien circonscrite, qui est en partie due à une politique de la ville concentrée depuis 2002 sur le bâti et non sur le social. Jean-Louis Borloo, qui a par ailleurs une image de ministre assez sympathique, a privilégié une politique de déconstruction/reconstruction. Fadela Amara et Christine Boutin parlent beaucoup de désenclavement. L'accent n'est plus mis directement sur les conditions sociales de vie des habitants.
On parle ainsi de villes à trois vitesses, dans lesquelles les classes moyennes sont regroupées en zones péri-urbaines, les classes aisées dans les centres-villes et les classes paupérisées dans les zones urbaines sensibles. Une classe sociale est captive, c'est la plus démunie. Et les autres pratiquent délibérément un comportement d'"entre-soi", de peur de basculer dans la catégorie plus pauvre.

Sur le terrain, quels changements avez-vous constaté depuis les émeutes de novembre 2005, et en particulier dans les rapports entre les jeunes et la police ?

- Les relations s'aggravent, se tendent. Comme on a pu le constater à Villiers-le-Bel, les jeunes réagissent au quart de tour, les violences sont déclenchées immédiatement. Et d'après ce que j'ai pu lire dans la presse, les policiers qui se font insulter répondent de la même manière. Ce qui est assez préoccupant d'un point de vue déontologique. La situation de paupérisation dans les ZUS s'étend, et les tensions augmentent en même temps.

Interview de Jean-Marc Stébé par Solène Cordier
(le lundi 26 novembre 2007)

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