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Gauche ouvrière et chrétienne
31 janvier 2008

Trois leçons du Forum de Davos

par Dominique Moïsi (*)

La retraite de Bill Gates, le fondateur de Microsoft, qui consacre désormais son énergie et son immense fortune à des oeuvres humanitaires, résume d'un grand trait l'édition 2008 du Forum économique mondial de Davos (Suisse). Au-delà de la retraite d'un homme, n'était-ce pas à l'effacement progressif de son pays, les États-Unis, que les participants de Davos ont assisté ? Effacement relatif, mais réel.

La première leçon de Davos n'est qu'une confirmation. Le flambeau de l'histoire est en train de passer de l'Occident à l'Orient. En pleine turbulence des marchés financiers, Américains et Européens, inquiets et désorientés, ont fait l'étalage de leur impuissance. Au XXe siècle, on disait que, lorsque l'Amérique éternuait, le monde prenait froid. Aujourd'hui, on est tenté de dire que, lorsque l'Amérique a une pneumonie, l'Asie qui réussit, c'est-à-dire essentiellement la Chine et l'Inde, attrape un rhume.

La confiance des dirigeants asiatiques, présents en grand nombre à Davos, a traduit le contraste criant entre la culture d'espoir de l'Asie et la culture de peur de l'Occident. Après la guerre en Irak et l'incapacité initiale de l'administration Bush à faire face à la catastrophe naturelle de Katrina, la crise des subprimes apporte une illustration supplémentaire du déclin relatif de l'Amérique. Et ce n'est pas l'Europe, qui a fait davantage à Davos l'étalage de ses différences que de son unité, qui est prête à prendre le relais.

Les Émirats arabes comme Abu Dhabi peuvent bien signer des accords privilégiés avec la France, ils ne recherchent pas un modèle en Europe, mais en Asie, à Singapour pour être plus précis. Ils regardent l'Asie comme un continent de l'espoir.

La deuxième leçon de Davos 2008 tient en une formule : « L'État est de retour ». Le fondateur du Forum de Davos, Klaus Schwab, proclamait, dans un article publié, à la veille de la rencontre, dans la revue américaine Foreign Affairs : « Comment le business peut sauver le Monde ».

Les participants de Davos posaient la question de manière radicalement différente : « L'État peut-il venir au secours du business ? » L'expression « business » est sans doute trop réductrice. Car il convient de distinguer entre les industriels et les financiers. À Davos, les premiers n'étaient pas loin de se réjouir des malheurs des seconds. L'économie réelle prenait enfin sa revanche sur l'économie virtuelle, ce qui permet de dénoncer l'arrogance et l'imprudence des financiers. Mais banquiers et industriels s'entendaient sur un point : on a besoin de l'État comme acteur de régulation et de contrôle, en ces temps d'incertitude et de confusion. Les sanctions imposées à Microsoft par la Commission européenne sont perçues comme un pas dans la bonne direction.

La troisième leçon de Davos est plutôt une interrogation. Et si quinze ans d'unification du monde par les marchés et d'interdépendance et de transparence absolue avec la mondialisation avaient suscité la nostalgie d'une fermeture des frontières et la tentation d'un repli sur soi identitaire ? Une nostalgie irréelle, bien sûr, mais qui renvoie à du ressenti. Il convient d'en saisir les ressorts pour mieux comprendre l'évolution de la mondialisation.

Vue de Davos, la mondialisation, initiée par l'Occident capitaliste et libéral, semble déboucher sur des résultats étonnants. Moins d'Amérique et plus d'Asie, le retour de l'État régulateur et la nostalgie des frontières face à un monde devenu trop insaisissable et menaçant. Davos se veut le chantre de la mondialisation, il en exprime - malgré lui - les contradictions.

ouest - france   31/01/08

(*) Conseiller spécial à l'Ifri (Institut français des relations internationales).
Dominique Moïsi (*)

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Commentaires
J
commenté sur mon blog complétement opposé à votre approche anti-chrétienne et appauvrissement générale.<br /> J'ai 50 ans, vit dans un grenier sans chauffage ni eau chaude, avec moins que le RMI comme revenu... Je porte des journaux pour me faire moins que le RMI.<br /> Et je ne supporte pas ce monde étatique, poisson de l'initiative individuelle, monde qui hait la liberté qui s'incarne sous forme de profit, argent libre.
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